Réponse au Point
« Madame Laurence Neuer,
Après lecture de votre article daté du 8 mai 2015, intitulé « Cette loi du martinet qui se mêle de tout », notre groupe souhaite vous proposer un point de vue très éloigné (mais plus éclairé) de celui proposé par la doxa ambiante.
Par trois approches différentes, scientifique, humaine et sociétale, notre groupe espère que vous verrez les personnes luttant contre la violence exercée contre les enfants comme des militants humanistes, plus que comme des « puritains »…
Pour une approche scientifique de la violence éducative, de nombreuses études en neurosciences ont prouvé l’intérêt de l’éducation non violente, du maternage,et démontré les dégâts causés par le stress et la violence.
Le concept de maternage, loin de ce que vous pensez être une lubie ou une dérive sécuritaire, voit le jour dès les années 1950, grâce à un psychiatre, John Bowlby. Théorie scientifiquement prouvée depuis par les neuro-sciences.
Michael Meaney, dès 2001, (Annual Review of Neurosciences) a prouvé que le maternage permet le bon développement des fonctions cognitives et du système neuronal. Ainsi, lorsque vous écrivez « le législateur aime à nous materner », je suppose que vous signifiez par là que notre pays suit la voie qui permet à ses administrés d’évoluer mentalement…
D’un point de vue plus centré sur l’humain, l’éducation non-violente est le contraire du laxisme. Elle est certes plus chronophage, car expliquer, faire preuve de stratégies éducatives pour détourner les conflits, ou les apaiser sans frustration demande effectivement plus de temps que le geste de mettre une tape. Mais elle est également plus gratifiante, car les relations familiales, sereines, ne sont plus fondées sur des rapports de force continuels, mais sur un respect commun, sans hiérarchie qui écrase celui qui ne tape pas assez fort.
Au-delà de ces réalités qui peuvent paraître utopiques à ceux et celles qui n’ont pas le bonheur d’avoir essayé, il existe une tragédie, une hécatombe passée sous silence : deux enfants meurent chaque jour en France sous les coups des adultes responsables de leur éducation ! C’est cet aspect humain, tangible et inacceptable qu’il aurait été plus honnête de traiter dans votre article, cette violence mortifère n’existant qu’à cause du droit de correction et de châtiments corporels. Il n’existe pas de « petites violences » ; la violence, qu’elle se manifeste par une tape sur la fesse ou par une gifle est illégale sur tous les adultes, pourquoi devrait-il en être autrement pour les enfants ?
Pour une approche sociétale, loin de créer des « enfants-rois » dont les médias sont si friands, l’éducation non-violente permettrait à toute une génération de ne plus apprendre depuis le plus jeune âge à se taire sous les coups de celui qui frappe le plus fort, ne pas s’écraser sous l’autoritarisme, et faire valoir ses points de vue sans violence physique. Interdire la violence éducative engendrerait une génération de citoyens, et non de moutons.
Pour illustrer ce propos, nous avons l’exemple des pays scandinaves, dont la Suède, pionnière dans l’interdiction des châtiments corporels, qui, loin de subir une génération de hors-la-loi, voit au contraire ses prisons se vider par manque d’effectifs. Quarante-quatre pays ont déjà aboli les châtiments corporels. Sur les vingt-huit pays européens, dix-huit ont déjà franchi le cap. Pour la France, qui se veut égalitariste et protectrice, c’est un retard de prise de position incompréhensible.
Sur ce point de vue de la société, dans votre article est écrit « La protection des faibles contre la violence et l’intolérance engage même la loi à se glisser dans la vie familiale et l’intimité de chacun ». Je vous propose de remplacer le mot « faibles » par le mot « femmes ». Je pense que cela vous éclairera sur votre propension à défendre les bourreaux plus que la sécurité de tous. Le spectre de l’intrusion de l’Etat dans les affaires d’autrui est agité à chaque loi progressiste : les violences conjugales, la contraception, le mariage homosexuel.
Pour conclure, nous avouons être étonnés de devoir, en France, pays des Droits de l’Homme (mais pas des enfants), justifier le fait et la justesse morale de ne pas taper sur ceux que l’on aime…
En espérant que cette lettre en réponse à votre article réducteur, mal-informé et insultant, vous donnera envie de découvrir par vous même les bienfaits de la non-violence éducative.
Cordialement,
Groupe Facebook « non à la Violence Educative Ordinaire »
(5283 membres) »